Le gros Mek Bartruk regarda avec appréhension la grosse hutte qui se tenait fièrement (et bancalement) devant lui. Elle était richement décorée de divers totems et trophées, tous aussi ostentatoires et grotesques les uns que les autres.
Bartruk ne put s'empécher d'admirer l'impressionnante collection de crânes et de casques ennemis attachés à l'un des poteaux qui retenaient l'imprevisible structure en place. Arrivé devant la porte, il l'ouvrit, et rentrat.
La cabane n'était en fait qu'une seule pièce spacieuse, poussièreuse, malodorante et mal éclairée. La salle contenant encore plus de trophées et de prises de guerre qu'au dehors . Un mur entier était recouvert de Fling' kustom, tous soigneusement astiqués. Sur un autre mur, une grande carte très grossière, représentant sûrement la région, était recouverte de flèches, de croix et d'instructions diverses, telles "Ici tout casser", ou "Cabane boss".
En regardant une tas de têtes humaines, un cri strident fit sursauter le Mékano. Il se retourna et reconnu aussitôt Mordeur, le squig préféré de son Big boss, enfermé dans sa cage en train de regarder l'inconnu en bavant.
"_Ah, t'es là, mon vieux Bartruk," grogna une voix gutturâle dans le dos du mek.
Celui-ci se retourna et reconnu son Chef de Guerre, Crakmar Têt'-En-Fer, trônant fièrement dans sa méga-armure sur un siège en pierre.
"_Salut, Big boss Crakmar, dit le mek.
_ T'a été long, hurla le boss. C'tait tellement long k'j'ai faillit envoyer Mordeur te chercher !"
Et il éclata d'un rire sonore si puissant que la cabane trembla légèrement. Bartruk fit mine de rire : que ce soit drôle ou non, il fallait mieux toujours rigoler aux blagues de son Boss.
Retrouvant soudain son sérieux, celui-ci hurla avec force :
"SARNAKR !"
Bartruk se demanda alors s'il s'agissait d'un cri de guerre et si son boss allait l'attaquer, avant de voir un gretchin accourir en couinant :
"_Oui, boss ?
_ Vas nous chercher d'la bière dans ma rézerv' personnell', rugit Crakmar, et fait fissa, feignasse !"
Le gretchin repartit et réapparut aussitôt, deux grosses choppes remplies d'une mixture jaunâtre à la main. Il les posa sur une table et décampa rapidement, mais ne put échapper à l'inévitable coup de pied que lui envoya son Boss dans les côtes. En râlant, il sortit de la cabane.
Crakmar s'adressa alors à Bartruk:
"_Alors... Alors, alors, alors..."
Prenant les deux choppes, il en passa une au Mek.
"_Alors quoi ? brailla ce dernier, fixant avec interêt un insecte qui se baignait dans sa choppe.
_J'ai besoin eud' toi, Bartruk.
_Ah oué ? Eud'moi ?
_Oué, toi, dit Crakmar. T'es l'meilleur de tout mes mékanos et s'ke j'veux d'mande de la cervelle."
Bartruk écarquilla les yeux, lui donnant l'air d'un parfait ahuri, et commença a écouter avec interêt. Peu de gens le complimentait ainsi, à part ses assistants, bien sûr, mais il les avait entraîner pour ça. Un peu sonné, il but une longue lampée de bière.
"_Et t'a b'soin d'koi, boss ? commença-t'il. J'peux t'refiler des fling' que j'ai piquer à des Sun'z ki viennent de passer, t'sais, ceux qui avaient des...
_J'veux mon Stompa", lachâ le Crakmar.
Le Mek s'étouffa.
"_T'veux un... un Stompa ?
Oué, grogna le boss en se léchant les babines, j'veux un Stompa, l'plus gros d'la galaxie, avek des fling's, plein plein d'fling', et des rokettes et des kanons partout. J'veux un Stompa ki puisse péter une montagne avec ses pieds, un Stompa k'écraz les zoms comme des moustiks. J'veux MON Stompa.
_Oké, dit Bartruk en s'éssuyant le front avec son avant-bras... Oké, j'ai jamais fait ça, mais ça doit pas être trop différent d'un dread. Tu l'voudrait pour kan ?
_Dans un mois.
_Nan, nan, j'ai dis " pour kan " ?
_Bah dans un mois, répéta Crakmar. Koi, y'a koi de pas bien ?
_Eh ben... Un mois c'est kourt, j'ai plein d'boulot avek ces konnards de kram'boyz ki me rembourse pas, et pi ya les pillards de Skunzz, à chak' fois k'ils passent j'perd plein d'trucs, et puis..."
Le mékano s'interrompit. Crakmar venait de se rapprocher de lui si rapidement qu'il en eut le souffle coupé.
"_J'me suis pas trop bien fait komprendre, grogna Crakmar. en montrant ses crocs. J'ai dit que j'voulais un Stompa dans un mois, j'l'aurai dans un mois, pigé ? Sinon, j't'écraz et j'refile le job à Mikssoff, lui au moins il chipotte pas kan ou lui d'mande kek' choz."
Il avait touché un point sensible. Le mékano bomba la poitrine :
"_Chui plein d'fois plus fort k'cett' tarlouz' de Mikssoff, rugit-il, et ton Stompa, j'te l'ferrai en un mois, et ce s'ra l'plus gros Stompa d'l'histoire de l'Univers, mêmes k'on l'verra de depuis une autre planête, et ça s'ra beaucoup bien ke tous s'ke pourrait faire ce troufions d'Mikssoff !"
Sur ce, il lança sa choppe par la fenêtre, donna un violent coup de pied dans une armoire, qui s'éffondra, sortit de la hutte et claqua la porte le plus bruyamment possible, laissant là le Big boss, surpris mais satisfait. Il entendit derrière la porte son mékano rugirent en s'éloignant :
"_EUL' PLUS GROS D'TOUT L'UNIVERS !!!"
Sur le chemin conduisant à son atelier, Bartruk continuait à fulminer :
"_ S'pas lé ognons d'Mikssoff, bordel, maugréa-t'il. Y va pas m'piker ma place de premier mékano du Boss."
Arrivé au garage, un gretchin, qui n'avait apparemment pas remarquer le regard sanguinaire de son maître, lui lança de sa petite voix moqueuse :
"_Alors, p'tit chef ? Tu t'es enkore fait engueuler avek tes fling' trafiqués ? il voulait koi, l'boss ?"
Il se prit un coup de poing monumentale sur le crâne.
Toujours ivre de rage, il entra dans son atelier en brisant la porte en deux sur son passage, et hurla :
"_ Markbnar ! Gorknobss ! Rankznar ! ICI TOUT DE SUITE ! "
Les trois mékanos arrivèrent de différents endroits de l'atelier, l'un de l'huile noirâtre plein les mains, l'autre un tas de tôles sur les bras, le dernier tenant une roue. Tout trois regardait leur Gros Mek avec surprise.
"_On va faire un gros truc, les gars ! hurla celui-ci. Ram'nez moi ces ordures de kram'boyz, toutes les plaques de ferrailles ke vous trouverez, et plein plein de boy'z. Et dite ke dalle à ce connard de Mikkssoff, on fait un Stompa !"
Les mékanos rugirent d'éxitation et sortirent à toute vitesse de l'atelier. Pendant ce temps, Bartruk s'asseya sur une table en imaginant déjà la forme de son bébé...
